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DAPHNÉ
Le Bernin - Apollon et Daphné
Daphné
Quand j’ai fui, mourant d’épouvante,
L’âpre étreinte du dieu de feu
Qu’un désir impudent tourmente,
Nature, te crois-tu clémente
Pour m’avoir, docile à mon vœu,
Sous l’écorce enclose vivante ?
(L'un des "Sizains métamorphiques" du recueil Marginalia)
DAPHNÉ
Avant elle, ses pieds ont fui, bondi son sang;*
Leur frénétique effort de roc en roc transporte
Un corps tremblant, et l'effarement qui l'escorte
Étouffe jusqu'aux cris du cœur incandescent.
Pourquoi frémir qu'un dieu, dont la lyre consent
À fredonner l'écho fervent des amours mortes,
Pose contre sa peau des mains chaudes et fortes
Et courbe vers sa chair un front resplendissant?
Dans l'élan fou de l'animal qu'on décérèbre,
Elle a fui la clarté cruelle à ses ténèbres:
Le dieu retient ses pas, soit pitié, soit ennui,
Quand l'Érinye, à l'âme que l'effroi calcine,
Ouvre l'ombre des bois, une écorce, et la nuit
Où mûrit le regret de l'étreinte divine.
(Sonnet extrait du recueil Marginalia)
*Première irrégularité: dans la poésie classique, "sang" ne peut pas rimer avec des mots qui se terminent par -ent.
D'autres rimes irrégulières plus bas: décérèbre/ténèbres, ennui/nuit.
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